C’est cette semaine selon le calendrier établi par le gouvernement fédéral que les entreprises qui ont eu recours au Compte d’urgence pour entreprises canadiennes (CUEC) en 2020 pour faire face aux pertes encourues en raison des mesures sanitaires, doivent rembourser jusqu’à 40,000$ si elles veulent bénéficier du rabattement qui peut aller jusqu’à 20,000$ sur un prêt de 60,000$. Et ce malgré les demandes unanimes des provinces, de nombreuses municipalités, de la Fédération canadienne des entreprises indépendantes, du Bloc Québécois, du NPD et de tant d’autres intervenants qui considèrent ce délai irréaliste pour les PME dans le contexte actuel. Encore une fois, la même arrogance ‘Ottawa knows best’.
Pour beaucoup de petites entreprises, ce rabattement était la seule forme d’aide non-remboursable qu’elles ont reçue durant la pandémie malgré que les mesures exceptionnelles de confinement aient affecté de nombreuses entreprises jusqu’à l’automne 2022, particulièrement celles des secteurs récréotouristiques et culturels. Une aide toute en contraste avec celle offerte aux grandes entreprises inscrites en bourse qui ont pu compter sur des subventions salariales même quand elles continuaient d’être profitables. Des subventions pour la grande entreprise, de l’endettement pour les PME, un scénario très fréquent.
Si la plupart des entreprises bénéficiaires ont remboursé ce prêt à ce jour pour bénéficier du rabattement, il en va autrement de celles des secteurs récréotouristiques et culturels. Si beaucoup de secteurs d’activités ont été affectés durant la première année de la pandémie, il en va autrement pour les années 2021 et 2022. Durant les deuxième et troisième années de la pandémie, ce sont surtout ces secteurs d’activité qui ont été affectés avec les confinements, couvre-feu et fermeture des frontières, alors qu’aucune donnée épidémiologique ne les identifiait comme des foyers importants de propagation de la pandémie. Les gouvernements ont tout simplement décidé que ces secteurs d’activité étaient moins essentiels en oubliant que pour des centaines de milliers de gens, ce sont leurs gagne-pains et leurs entreprises qui ont été sacrifiées. Les aider financièrement était bien la moindre des considérations. Surtout quand on sait que la pandémie s’est prolongée en raison du laxisme du gouvernement fédéral à mettre en oeuvre les mesures de quarantaine qu’il pouvait appliquer en vertu de la loi dès janvier 2020.
Les entreprises qui sont aujourd’hui incapables de rembourser ce prêt dans le délai fixé ne demandent pas d’effacer leur dette. Elles ne demandent que de reporter le délai de remboursement pour bénéficier de ce rabattement. Quand des entreprises ont vu leurs activités affectées de façon disproportionnée par les mesures prises par les gouvernements pendant trois ans, leur demander de rembourser la dette contractée en un peu plus d’un an est tout simplement irréaliste. Pour des dizaines de milliers d’entreprises qui sont souvent les jeunes pousses innovantes de ces secteurs d’activité, ça risque de les pousser à la faillite et de créer des centaines de milliers de perte d’emploi. Surtout avec l’inflation, la flambée des prix et la dégradation de la situation économique et sociale qu’a généré la pandémie. On en voit tous les jours les conséquences en circulant sur nos artères commerciales où le nombre de locaux vacants atteint des records. Pour l'offre touristique, la fermeture de ces entreprises innovantes est une perte considérable.
L’affaiblissement de nos communautés
Pour les communautés LGBT qui ont toujours compté largement sur ces pôles de sortie que sont les Villages comme points d’appui, surtout en l’absence d’aide gouvernementale significative pendant des décennies et jusqu’à ce jour pour soutenir l’action communautaire, le déclin de ces entreprises ne peut que contribuer à l’affaiblissement de nos communautés et renforcer la discrimination systémique. On le voit nettement dans le Village à Montréal qui avait assez bien résisté depuis le début du siècle au recul de la vie nocturne qui a accompagné le déclin des quartiers LGBT dans de nombreux pays. Le pourcentage de locaux vacants sur la rue Ste-Catherine dépasse les 20% et la misère humaine en hausse depuis la pandémie, stimulée par une politique d’immigration irresponsable du gouvernement fédéral, aggrave la situation.
De la même façon, en pleine crise des médias, la pandémie a durement affecté les médias LGBT qui comptent essentiellement sur les revenus publicitaires provenant d’entreprises des secteurs récréotouristiques et culturels. Ce qui ne peut à son tour que contribuer au déclin des communautés.
C’est à se demander jusqu’à quel seuil d’impopularité le gouvernement Trudeau doit dégringoler pour abandonner ce mépris qui contredit tous ses beaux discours d’’être là pour tous les Canadiens et Canadiennes’, et rectifier le tir?
André Gagnon
Éditeur, Guides GQ