La Duchesse de Langeais, découverte théâtrale de l’été, toujours bien vivante

par pierre perreault

« Ce soir, on ne fait pas l’amour, on se saoûle ! »


C’est sur cette réplique cinglante et bien sentie que la Duchesse de Langeais fait son entrée sur la petite scène qu’elle va occuper durant l’heure qui suit. Pendant six soirs, lors des festivités de Fierté Montréal en août et dans le cadre de Fierté Littéraire, au théâtre de la Comédie de Montréal, dans le Village, Luc Arsenault a fait revivre ce personnage haut en couleurs de l’univers des chroniques du Plateau Mont-Royal.


La Duchesse de Langeais, pièce écrite en 1968 par le dramaturge Michel Tremblay, raconte l’histoire d’un(e) artiste qui se rappelle, tantôt avec amusement, fierté et pavanement, tantôt avec mélancolie, tristesse ou colère, des phases ou expériences allant de sa petite enfance à ses 60 ans. La Duchesse de Langeais, ce personnage emblématique, voire mythique de l’œuvre de Michel Tremblay, est des plus actuels dans les affres de la société qui jugent à outrance les drags queens et le milieu LGBTQ+ de Montréal et de tout le Québec.


La pièce a été montée dans l’essence des années 70, afin de mettre en lumière ce précurseur du monde LGBTQ+ actuel et donner une leçon d’histoire des origines de cette communauté colorée.


Avec peu de moyens et à la suite d’une promotion réduite, misant beaucoup sur le bouche à oreille en surfant sur les publications de Fierté Littéraire sur les médias sociaux, le comédien Luc Arsenault a accompli un véritable tour de force, avec le concours de Fred Gagnon à la mise en scène, en faisant salle comble presque tous les soirs dans un coin de la salle de la Comédie de Montréal (une trentaine de places). Les spectateurs avaient l’impression d’être assis sur la même terrasse que la duchesse durant les 60 minutes que dure cette prestation.


Se tenant debout, au bar d’un tout inclus défraîchi quelque part dans le sud, celle qui se présente comme une des plus grandes stars mondiales, la Duchesse de Langeais, vous parle directement, à cœur et à corsage ouvert, de tout et de tout le monde. Son langage est coloré, étonnamment cru et elle en a gros sur le cœur. Elle nous parle de sa vie, se délectant en nous livrant les plus croustillants détails. Hilarante, irrévérencieuse, on ne sait si c’est vérité ou fabulations, mais on reconnaît entre les lignes toute la souffrance d’un homme qui garde, envers et contre tout, une soif d’amour insatiable.

Duchesse de Langeais
« L’univers de Michel Tremblay est riche de personnages plus colorés les uns que les autres. La Duchesse est pour moi une figure de proue du théâtre québécois. C’est avec une grande humilité et un profond respect que je me suis attaqué à ce personnage. Sous l’œil avisé de mon metteur en scène, nous avons donné une nouvelle vie à cet être attachant et haut en couleurs », explique Luc Arsenault, qui se réjouit de ce beau succès du mois d’août 2023 et qui, de toute évidence, s'est glissé dans la peau de la Duchesse sans ménagement.


Luc Arsenault a une formation en théâtre du Cégep Lionel-Groulx et œuvre dans ce milieu depuis plus de 40 ans. Comédien, formateur, metteur en scène, coach de théâtre, auteur-créateur, il est un touche-à-tout qui a visiblement pris grand plaisir à incarner ce personnage plus grand que nature. Ceux et celles qui connaissent l’œuvre de Tremblay seront charmés par cette interprétation magistrale.

 Duchesse de Langeais
À la suite de la première création sur scène de l’œuvre, on pouvait lire : « De tous les travestis créés par Michel Tremblay, La duchesse de Langeais est le plus tragique », écrivait Luc Boulanger, dans le défunt journal Voir, en juin 1996. « Une de ses œuvres les plus déroutantes, les plus crues, les plus drôles également », disait Jean Beaunoyer, critique à La Presse, le 23 juin 1996.


À l’extérieur des scènes de théâtre, dont celle du Trident à Québec en 2019 avec l’excellent comédien Jacques Leblanc dans ce rôle, on a peu vu la Duchesse au fil des années. Le metteur en scène et cinéaste André Brassard, grand complice de Tremblay, l’avait fait camper par le comédien Claude Gai dans son film « Il était une fois dans l’Est », en 1974, un collage de différents éléments tirés des chroniques du Plateau Mont-Royal, dont les Belles-Sœurs et Hosanna, par exemple. Le nom réel du personnage créé par Michel Tremblay est Édouard Tremblay, alias Antoinette de Langeais, duchesse.

 
L’expérience du mois d’août ayant suscité pas mal de réactions positives et d’engouement sur la toile, les deux complices ont décidé de ramener la Duchesse pour deux soirs, les 13 et 14 septembre 2023 sur la grande scène du Théâtre La Comédie de Montréal. Une présentation du Théâtre de Neuf Saisons.

Théâtre de Neuf Saisons présente
La Duchesse de Langeais
13 et 14 septembre 2023
20h00 à 21h30 / Entrée: 19h00
Théâtre La Comédie de Montréal
1113, Boulevard de Maisonneuve est,
MONTREAL, QC

Billetterie : https://lepointdevente.com/billets/laduchesseelangeais130923



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